mardi 19 juillet 2011

Tu m'inspires, par Sonia Lounis

Illustartion Djaffer Benmesbah
Collection privée de Kader Rabia

















Tu m'inspires !


Sans te définir, tu es l’objet de ma muse ; sans te définir, tu es ma douleur et mon remède ; tu es mon doux mystère, je veux, mais je crains de te découvrir. Tu m’inspires une douce poésie que je ne récite qu’au fond de mon âme trouble. Tu es la muse qui refuse de s’exprimer ; tu es un mal qui refuse de guérir dans mes mots ; tu es le remède d’une souffrance inconnue.


Je ne sais comment te saisir pour t’expliquer à moi-même ; j’ignore quelles phrases il me faut formuler pour les charger de mes sentiments ; je ne sais si je dois voir en toi l’ami ou alors attendre l’amant. Ce que je sais, c’est que tu es à la fois mon salut et mes tourments.

On me dit que c’est cela l’amour. Mais en cherchant à saisir, à comprendre ce «cela», je n’ai rien trouvé. Tout est soudain abstrait ; toi-même, tu deviens une image de ma pensée. Je me dis alors que sûrement, tu n’es qu’une apparition que j’aurais inventée pour mes rêves, un personnage pour mes fantasmes. Je me lance alors dans des interprétations freudiennes espérant trouver des clés à mes rêves et je te retrouve tout entier devant mon regard ébloui : une illusion d’oasis comme dans le désert ? Non ! Tu es bien réel et de mon cœur tu es l’éternel ! D’ailleurs, ni mes mots, ni mon imagination ne sont en mesure d’une telle invention ; tu es tout simplement la source de mon inspiration.

C’est peut-être mon admiration qui t’idéalise ; et j’aime courir après ton mystère pour le percer, pour le laisser me pénétrer tout entière. j’aime lire l’espoir dans tes yeux, cet espoir qui fait naître auprès de toi tout l’amour que je te porte. C’est alors seulement que je prends le goût en l’espoir, c’est alors aussi que je lui donne le souffle de nos vies réunies. Oh ! que j’aime l’espoir qui te fait mien et me fait tienne ! et puis j’aime l’espoir qui redonne l’éclat à ton sourire ; oui, j’aime cet espoir qui te caresse et te rend plein de vie. J’aime enfin l’espoir qui m’ouvre les portes de ton mystère.

Ta confiance me guide sur les sentiers de ton cœur et me montre le chemin. Lieux inconnus, certes, mais je ne m’y sens guère étrangère, ni intruse ; je suis tout simplement heureuse de marcher en solitaire attentive et plus encore enchantée d’être celle qui perce ton mystère. En faisant ainsi ta conquête, j’ai appris à t’inscrire dans mes vers et à donner ton nom à toute ma poésie ; ton visage ne cesse de s’identifier à la source de mon inspiration, le rythme de ton cœur à guider l’orchestre de mes mélodies. Mes phrases se nourrissent toutes de toi, et j’ai fini par te faire ma sentence, ma locution, mon proverbe, tant que tu m’inspires.

Je n’ai qu’une requête à faire : permets-moi de t’aimer comme la nuit aime les étoiles. Dans mes errances de solitaire aigrie, j’ai appris leur histoire d’amour et ce fut un long apprentissage. J’ai longtemps côtoyé les nuages migrateurs à la quête de tous ces majestueux secrets géniteurs de cette éternelle passion. Dans leur lit humide, j’ai retrouvé toutes leurs larmes mêlées à des douceurs exquises, et c’est là que j’ai retrouvé le pardon. J’ai demandé aux nuages de m’apprendre leur pardon, ils m’ont alors inondée de leurs larmes et par elles, ils m’ont demandé d’arroser les peines de mon cœur. Car, m’ont-ils dit, il n’y a guère de bonheur sans peine et jamais de la chaleur sans humidité.

Je les ai priés de te laisser une place au soleil, ils m’ont appris que la seule lumière, la véritable chaleur sont celles que ton amour produit lorsqu’il brûle mon cœur. Ils ont, de ce fait, soulevé leurs pans et j’ai reconnu toutes les lacérations qui ont arraché à leur chair ces larmes qui arrosent la vie. Mais le soleil qui passait à travers ces pans soulevés révélait aussi d’autres secrets pour moi, sa douceur n’avait rien d’égal avec la passion qui prenait place dans mon cœur. J’ai donc tout simplement décidé de t’aimer jusqu’à ma propre douleur, à mon propre anéantissement s’il le faut. Je t’ai aimé à te dresser un culte et à chaque célébration de mon sentiment, Éros, Aphrodite et tous les dieux mythiques de l’amour me rejoignent sur l’autel du Parthénon de l’antique Athènes restauré pour l’occasion afin de bénir mon amour et renouveler le baptême de mon cœur. Je te ferai mon dieu et te nourrirai de nectar et d’ambroisie, met des dieux qui assure l’immortalité.



Sonia Lounis, in Soliloques des quatre saisons

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