mercredi 24 août 2011

La marche, par Abderrahmane Yefsah

Caricature Abderrahmane Yefsah




















La marche

   Les marcheurs, qu'ils sachent ou non, où aller, leur importait peu. Néanmoins, la confiance semblait leur être revenue. Une certaine béatitude nous animait et aucun signe de surmenage ni d'ennuis ne vint altérer la détermination irrésistible qui nous animait.
   Sortant de la ville, arpentant les chemins poussiéreux, nous eûmes de bien singuliers spectateurs. Non pas les "hittistes" et autres badauds, mais des oiseaux ; toutes les familles ailées étaient perchées, qui sur un arbre, qui sur un pylône électrique, qui sur un poteau téléphonique et autres promontoires. Tous les espaces aérien étaient pris. De tâches noires émaillaient les quelques familles des arbres, eucalyptus et autres frênes, encore verts malgré l'aridité de la saison. Les oiseaux suivaient du regard l'infini serpentin humain qui se défilait sous leurs yeux. Impressionnant ! Les charognards, dérangés dans des festins royaux, les victimes innocentes qu'ils se disputaient à coups de becs et d'ongles, battirent des ailes de désappointement. Normal ! Ils ont été dérangés dans leur prélassement quotidien alors qu'ils s'apprêtaient à faire la sieste quotidienne. Les carnassiers, avec l'envergure de leurs imposantes ailes, vinrent se frayer des places les plus en vue, hiérarchie oblige, au milieu des autres volatiles. La suite de la marche leur devint intéressante subitement. La promesse, l'espoir d'un foie tendre comme dans le lointain Prométhéé, Zeus leur donna des suites dans les idées certainement.

   Phénoménale ! Impensable ! Les marcheurs se surprirent à comprendre le langage des volatiles. Autant ils eurent les encouragements des colombes et autres oiseaux à beaux plumages et rendirent à l'émerveillement de ceux-ci par une expression des plus joyeuses, une joie indescriptible ! Autant les marcheurs exprimèrent leur courroux et leur rage à l'encontre des oiseaux rapaces dont les échanges se limitaient à individualiser de potentielles victimes à qui la fatigue finirait par donner le coup de grâce et dont les parties tendres constitueraient les morceaux de choix qui, par le droit du plus fort, leur reviendrait de droit...

Aderrahmane Yefsah
Extrait de La marche [inédit]

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