mardi 2 février 2016

Constat en prose décousue, Par Kader Rabia




Constat en prose décousue/ Kader Rabia


Chaque année, chaque cycle
Je me dis :
Enfin je vais m’occuper de moi-même
Je me retape je me recycle
Et chemin faisant…
De mes tentes dressées le long des tordus parcours
Sortent des chants comme des règles,
Rappels de mes déboires, fiascos de mes détours

Harmonie illusoire
Frêle synchronie de mes pas lourds
Je redeviens l’apollon vissé au sol
A la merci des regards des femmes déçues
Je redeviens l’insoumis sans boussole
Insensible aux rendez-vous perdus
Je redeviens la Putain aveugle
Dont les hommes ne cessent de déchiffrer le langage
Et les tatouages décousus
Je redeviens Léon le Numide
Ex redresseur de torts, de Tlemcen à Rome
Aujourd’hui Lambda visible de Gibraltar à Oslo
Je redeviens Melquiados, attendu dans les chaumières
Et les vergers mal entretenus
Où des enfants ont toute l’année peur et froid
Je redeviens une potion de contrebande
Accessible mais peu rassurante
Je redeviens le sel que j’ai déjà été
Présent à chaque retour de saison
Dans les baluchons des caravanes têtues
Je redeviens le son de la flûte
Demeurée triste depuis la capture de Jughurta
Invariable depuis le règne paisible de Tin Hinan
Comme un rayon de lumière
Posé sur le coin d’un vieux piano
Orphelin, délaissé et poussiéreux



Notes :

*La putain aveugle: poème de B.C.SAYYAB
*Melquiados: personnage de G.G.Marquez




2 commentaires:

  1. Très joliment écrit.
    On t'a peut-être cambriolé, mais on n'a pas pu te prendre l'essentiel : Tes neurones, ta raison.
    Bonne continuation sur ton chemin, poète, fut-il sinueux.

    Makhlouf Bouaich.

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  2. J'aime beaucoup ce texte. Redevenir, un second devenir. C'est puissant, lourd, comme une armée de soudards harnachés pour tirer le pesant passé hors de l'eau, Créer une nouvelle naissance. Il y a de belles variations sur les voyelles, particulièrement douces.
    Bises, cher Kader.

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